Pourquoi Netflix ne va pas changer grand chose en France…
Vous avez tous du entendre parler de l’arrivée de Netflix en France ces dernières semaines. Les articles se multiplient pour expliquer le fonctionnement du service, le prix, l’intérêt, etc. D’un point de vue e-commerçant, Netflix est passionnant : une grande partie de son service repose sur son algorithme de recommandations de films et de séries (sujet qui ne vous est pas inconnu ici 🙂 ). Mais en réalité, l’efficacité du service n’est pas la question la plus importante aujourd’hui…
Qu’est-ce que Netflix ?
Il est bon de savoir précisément de quoi on parle : Netflix est un service de streaming, légal, qui fonctionne par abonnement. Il existe depuis de nombreuses années aux Etat-Unis (où il rencontre un succès impressionnant) et s’implante un peu partout dans le monde. Pour 7,99€/mois vous pourrez donc regarder en ligne autant de séries et de films que vous le souhaitez. Présenté comme cela, Netflix apparaît comme la réponse parfaite aux téléchargements illégaux (et aux disques durs qui se multiplient pour stocker les stocker). Mais quel est le catalogue auquel les abonnés auront accès ?
Tous les films ? Toutes les séries ?
Non. Et c’est finalement la seule question intéressante ! Tous ceux qui ont eu l’occasion de se familiariser avec l’interface le savent : Netflix est simple d’utilisation, accessible à tous ; mais si le catalogue n’est pas intéressant, son efficacité et sa simplicité d’utilisation importe peu ! Or celui-ci est loin d’être complet !
Bien sûr la liste des séries accessibles sera assez impressionnant ; même s’il manquera toutes les séries diffusées par HBO qui dispose de son propre système de streaming (qui n’est pas accessible en France). Quand on connaît la qualité des séries d’HBO, le succès qu’elles rencontrent (Game of Thrones, True Detective, The Newsroom, etc.), il s’agit quand même d’un manque important… En ce qui concerne les films, les choses deviennent très complexes.
La chronologie des médias
En s’installant en France, Netflix doit se soumettre à un certain nombre de règles qui régissent la diffusion des films dans notre pays : la chronologie des médias. C’est cette chronologie qui fixe l’exploitation des films en salle à 4 mois avant leur sortie DVD, puis 10 mois pour les chaines payantes, et 22 mois sur les chaines publiques. Récemment, la VOD est devenu un nouvel acteur majeur qu’il a fallu intégrer à cette chronologie.
Deux situations différentes existent pour la VOD :
- la VOD à l’acte : vous ne disposez pas d’un abonnement, vous payez seulement pour un film. Dans ce cas, vous pouvez voir un film seulement 4 mois après sa sortie en salle (la durée est la même que pour les sorties en DVD).
- La VOD par abonnement (SVOD) : vous payez tous les mois pour accéder à un catalogue de films. Il vous faudra alors attendre 36 mois pour qu’un film sorti au cinéma rejoigne le catalogue auquel vous avez accès.
Une question se pose alors : êtes-vous prêt à payer 8€ par mois si vous ne pouvez pas avoir accès aux films récents ?
La réponse bien sûr dépendra des pratiques de chacun : beaucoup attendent Netflix pour les multiples séries qui seront accessibles ; mais d’autres espéraient avoir accès aux films… La chronologie des médias a rendu cette dernière attente impossible !
C’est pourquoi, si Netflix va très certainement apporter une solution intéressante en ce qui concerne les séries et les films de patrimoine, il présente un intérêt assez limité en ce qui concerne le cinéma d’aujourd’hui.
Les dernières propositions apportées par le CNC (Centre National du Cinéma) concernant les modifications de la chronologie des médias ne changent rien : les durées sont quelques peu raccourcies mais globalement, aucun changement majeur n’est attendu.
Un service vraiment intéressant ?
Dans ces conditions, Netflix peut-il changer quelque chose aux chiffres du téléchargement illégal ? Probablement pas… Dans le monde d’aujourd’hui personne n’attendra 36 mois pour voir un film légalement quand il suffit de quelques clics pour accéder à celui-ci.
Nos responsables politiques et les acteurs de l’audiovisuel (le CNC, les ayants droits, etc.) qui n’ont rien trouvé de mieux que d’inventer l’Hadopi pour lutter contre le téléchargement, devraient prendre le temps de mieux comprendre la réalité d’aujourd’hui ! Si vous voulez faire baisser le téléchargement, proposez aux utilisateurs une solution plus avantageuse que ce qui est aujourd’hui accessible via les sites de streaming illégaux et les torrents ! Proposez un large catalogue de films en VOST, sans publicités intempestives, sans problème de téléchargement, sans coupures liées à une mauvaise connexion ! Créez une offre qui réponde réellement aux usages d’aujourd’hui et les internautes pourront enfin quitter les sites de téléchargement illégaux et leurs publicités. Mais arrêtez de croire que qui que ce soit aujourd’hui est prêt à attendre 36 mois pour voir un film ET à payer pour cela !