« Moi, je le fais en un jour »

Titre énigmatique…

Je m’explique :

Vous travaillez sur un projet, en assistance à maîtrise d’ouvrage.

Vous avez identifié un point un peu complexe, soit pour des raisons techniques, soit pour des raisons fonctionnelles, soit… pour plein de raisons combinées.

Lors d’un point projet, quand on parle du point en question, vous faites état de sa complexité, et des conséquences, en terme de coût, de risque et de délais.

Il arrive qu’un gars prenne le contre pied de ce que vous expliquez, pour dire que lui, il ferait ça en un jour (ou une heure, … l’idée est la même).

L’effet d’une telle intervention est toujours fort… Et la réaction est nécessairement délicate.

Si vous entrez dans le débat, pour expliquer la complexité, vous entrez invariablement dans un concours d’experts, qui va lasser tout le monde et surtout, ne convaincre personne.

De plus, comme vous connaissez votre sujet, si vous avez dit que c’était compliqué, c’est que ça l’est probablement. Notre compère, celui qui dit qu’il ferait ça très rapidement, est donc soit en train de se tromper, soit… de déformer la vérité (c’est dit gentiment, hein ?).

Attention, je ne dis pas que je ne me trompe jamais ! Mais bon, avec de l’expérience…

La question que je me pose toujours est : « mais pourquoi fait il ça ? »

Plusieurs réponses possibles :

  • C’est une façon de se mettre en valeur. Du moins le croit-il. Si un « expert » dit qu’un point est complexe, et que le gars peut le résoudre très rapidement, c’est que c’est un crack.
  • Par incompétence. Toujours possible… Ou plus simplement par manque d’expérience… On apprend, avec le temps, qu’entre le petit programme qui fait le truc et la solution complète, fiable, testée, qui résiste aux aléas du monde extérieur, …, il y a bien souvent un rapport de 1 à 10, voir bien plus !
  • Par calcul. Le gars à une idée derrière la tête, et son intervention à comme objectif de faire avancer son idée. Plusieurs cas possible :
    • Il veut vous déstabiliser, pour travailler en direct, sans « ce consultant externe qui vient nous apprendre à travailler »
    • Le développement du dit composant l’intéresse.

Dans la réalité, c’est souvent un mix de ces raisons qui pousse à faire ce genre d’intervention.

Quelle est la meilleure réponse ?

Je n’ai pas de solution miracle, et ce genre d’évènement fait perdre du temps…

J’ai tendance à penser que la solution, qui consisterait à dire : « vas-y, fais-le » est une fausse bonne idée. Il y aura toujours plein de bonnes raisons « externes » pour excuser le temps passé, et puis, le rôle d’un consultant n’est surement pas de prouver quoi que ce soit, mais de faire avancer le projet.

Ce que je fais en général :

  • Pas de discussion technique, d’expert, en réunion.
  • Essayer d’avoir une discussion sur le sujet avec le gars, en face à face, et d’échanger sur un plan purement « métier » (fonctionnel, technique, …).
  • Si « rien ne bouge », il faut des avis externes. J’avance donc sur le projet, et je consolide mon avis avec celui d’autres boites.

Et vous, vous feriez quoi ?

11 commentaires

  1. En tant que prestataire très orienté technique, nous avons quelques fois en face de nous ce type de personnes, et effectivement c’est pénible.

    Le discours que l’on tient à ce moment là est destiné à rassurer le client qui peut se dire « tient, ils ont essayé de m’avoir avec une fonctionnalité facturée bien plus cher que sa valeur réelle ».

    En général, la relation de confiance que nous avons établie avec eux nous permet de les rassurer. Nous essayons également d’expliquer avec des mots très simples (pour ne pas les noyer dans la technique) pourquoi c’est complexe. Les clients aiment cela, car on se met à leur niveau et qu’on leur donne les cartes pour décider face à un problème où ils peuvent se sentir « pris en otage » par leurs partenaires techniques.

    En résumé, c’est beaucoup de pédagogie 🙂

  2. Grand classique. Tu avais d’ailleurs déjà évoqué ce point précédemment : https://www.ziserman.com/blog/2007/12/12/pourquoi/

    Pour ma part, je réagis souvent de la manière suivante :

    Tu as raison, le développement pour simplement [réaliser|fixer] « le truc » peut être assez rapide. En revanche, il ne faut pas oublier que cela a un impact sur le reste du site en matière de parcours client / cinématique. Quid des tests de non-régression / performances / montée en charge, etc. Problématique de SEO ? Outil d’administration back-office ? etc…

    J’étais parmi ceux qui disaient que ca se faisait en un jour quand j’étais jeune 🙂 Depuis, j’ai appris à mieux estimer la charge.

    Julien (de MeilleursAgents.com)

  3. Bonjour,

    je crois qu’on se reconnait tous plus ou moins dans ces problématiques. Y réfléchir ne me semble pas du temps perdu puisqu’en définitive, ça peut aider pour tous les cas futurs qui se présenteront à réagir positivement et à éviter de perdre du temps en réunion.

    Je pense que le mieux est de demander à la personne d’aller plus loin dans son idée :
    « Alors M. X, avez-vous étudié la faisabilité, combien de jours Homme vous faut-il pour ce cahier des charges ?
    – [M.X :] J’ai découpé ce projet en sous-parties pour être le plus exact possible, il est néanmoins difficile d’être très précis. J’estime avec quelques aléas que nous aurons besoin de 15 jours Homme pour ce projet
    – [intervention SM pour SuperMan :] Ce délai me paraît surestimé. Pour avoir travaillé sur des projets similaires, je ferais cela en 1 jour si je m’y consacrais à plein temps
    – [M. X :] J’entends votre réaction, je suis assez mal à l’aise de constater un tel écart, je vous propose de revenir vers vous (M. le client) demain, et de m’entretenir avec SM entre temps pour voir la méthode qu’il appliquerait dans cette situation, je pense que nous avons deux visions différentes du point de vue technique sur le projet et préfère m’assurer du contraire. Avec votre accord SM ? (hochement de tête assuré)
    – [client :] Très bien, passons sur les délais pour le moment, bla bla bla »

    Ce n’est pas du vécu, c’est ce que je ferai(s) la prochaine fois. Qu’en pensez-vous ?

  4. Dans le cas d’un différend persistant, où on ne peut pas prouver par A + B que le délai est trop court ou que le rendu ne sera pas conforme aux attentes, ne reste guère comme solution que d’indiquer au client une estimation sincère du niveau de risque, et essayer d’anticiper les solutions aux pbms qui ne manqueront pas de se poser ensuite… :-/

  5. Bonjour,

    Je suis d’accord avec Julien.

    Je pense que la réaction à chaud, même très posée, n’amène que le doute dans l’esprit du responsable du projet chez le client. Car on rentre alors inévitablement dans un début de débat … qui, forcément restera un début, l’ordre du jour n’étant pas constitué d’un seul point.

    Une bonne réaction pourrais être d’indiquer prendre en compte la remarque du « personnage » et d’indiquer, afin d’éclaircir ce point sans retarder la réunion, l’envoi ultérieure d’une petite note de synthèse.

    En général, si la charge ou le risque est réel, l’argument « en un jour » ne résiste pas à une rédaction propre des arguments. On peut alors, grâce à l’écrit, être clair, logique sans être trop technique.

    L’écrit a également l’avantage d’imposer un retour formel du contradicteur. Si les raisons de sa réaction sont infondées, ce sera difficile.

    On peut aussi tenter l’humour,mais là, il faut vraiment avoir un gros pied dans la place …

  6. Une bonne méthode est aussi, si l’expèrience que l’on a est forte sur le sujet, de rester factuel et de passer au point suivant en n’oubliant pas de proposer d’envoyer aux parties prenante, le détail de ce que l’on a vécu concernant ce point lors d’un projet antérieur…

    Mais bon, parfois les consultants même avec de l’expérience, ne sont pas omniscients…et parfois techniquement pas à jour, alors plutôt que de raconter n’importe quoi, mieux vaut dire : »ce point très technique nécessite une analyse plus poussée…passons à la suite ».

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